extérieurs jours...

Comment tenter d'appréhender l'âme d'une ville, alors qu'on n'y est que de passage, en touriste, "extérieur" à ce qui s'y passe ? Marseille m'était tout d'abord  apparue figée, presque désoeuvrée : en vain j'avais cherché, autour du touristique vieux-port, une trace de l'ancienne activité dont témoignaient des films débordants de vie, comme si, depuis l'arrivée des premiers Phocéens, tout un peuple s'était mis au travail, avec constance, pendant des siècles,  avec les mêmes frétillements que les poissons dorés dans les paniers d'osier, désormais bien modestes...    Certes, les "points de vue" offerts aux touristes  restaient  impressionnants : la montée à Notre-Dame de la Garde, l'excursion aux îles du Frioul, le quartier du Panier ; mais cela suffisait-il ?

Rue marseille

Où s'était donc réfugié le coeur de cette ville ? Malgré tout son charme, ce n'était pas dans l'oasis de la Vieille Charité, halte splendide :

 

Vieille charite

Et je pestais contre mon statut, qui semblait m'empêcher de comprendre ce que je voyais. Oh, d'un autre côté, je ne comprenais que fort bien, que trop : tenez, le Vieux Port... Eh bien, si vous mettiez la pointe d'un compas au centre du bassin, et que vous traciez ainsi un cercle de 2 km de rayon tout autour, et que vous lâchiez dessus la horde touristique, prendriez-vous la décision adoptée (car il y a forcément eu une décision municipale, à mon sens) qui consistait à ôter à tous ces braves piétons touristiques la possibilité de satisfaire leurs besoins naturels, autrement dit de vider leurs vessies ?

 

Il n'y a aucune toilette publique dans le rayon sus-décrit. Pire encore : les Musées qui jouxtent la Mairie  et la Chambre de Commerce n'en offrent point non plus, ni aucun édifice public  ! Nous voici donc dans le pays des 36 000 normes, et des "bâtiments recevant du public", ailleurs submergés d'injonctions comme d'aménager ici des passages standardisés, là des toilettes pour handicapés, semblent ici curieusement libres de ne point offrir un service pourtant indispensable... Il reste les cafés, mais ces derniers ont  le soin d'afficher, à côté des précieux "petits endroits", la mention que ces derniers sont réservés à la clientèle (payante). Qui a décidé cela ? Le lobby des commerçants marseillais ? A deux euros, premier prix pour un café, cela peut effectivement se concevoir. Mais cela laisse l'impression d'un "racket à la vessie touristique" qui, pour peu onéreux qu'il soit, n'en est pas moins parfaitement désagréable...

Heureusement, de ce point de vue, tout s'arrange dès qu'on quitte la proximité immédiate du vieux bassin. Sans aller bien loin, juste au bout du bout du Port, on accède au luxueux Mucem. Et là, si les commodités sont parfaitement accessibles, elles en deviennent du coup complètement accessoires. Et je me rends compte, en écrivant, de l'iconoclastie qui consiste à parler de ce musée flottant en commençant par là !!!

Qu'il suffise donc que je vous dise que c'est là, pour la première fois, que j'ai cru rencontrer la Ville. Dans ce Mucem flambant neuf, symbole de l'année 2013 où Marseille fut sacrée capitiale culturelle européenne, et où le virage (irrémédiable ?) fut pris de remplacer l'ancienne image laborieuse de la Ville par cette large "ouverture culturelle" sur la Méditerrannée.

J'y perdis instantanément Clopin, rendu fou par le jeu des ombres et des lumières, admiratif devant les matérieux employés,  l'exploit technique et architectural (même si l'on nous glissa, peu après, que les constructeurs avaient peut-être un peu oublié que l'eau méditerrannéenne est salée, n'est-ce pas, ce que n'aiment guère les visseries et autres boulons....). Mais je fus bien moins vite conquise que lui. En fait, au prime abord, le bâtiment m'apparut tout entier comme contradictoire...

(la suite à plus tard, peut-être cet après-midi ?)

 

Les ombres du mucem

 

 

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