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L'appel à Tartes (3)

La tarte N° 3 : la Crème de la crème

 

Une lettre.

 L’organisatrice en chef avait envoyé une lettre à tous les inscrits, elle pouvait le certifier, accompagnée de tous les documents imaginables :  itinéraires divers et variés suivant de là où on venait, places de stationnement repérées par de grosses croix rouges sur des plans se dépliant et se repliant facilement, modes d’emploi des parcmètres municipaux au cas où, photo du buffet organisé à l’arrivée avec déclinaison des choix possibles entre les quatre sortes de thés et les 7 mini-viennoiseries offertes,  suggestion de la  marque recommandée pour les stylos dont nous devions être pourvus, plans des salles où se dérouleraient les ateliers, avec indication des  meilleures places  (celles près des fenêtres),  mention des  lignes vertes qui seraient peintes sur le sol  pour faciliter le repérage des toilettes, emplacements des prises électriques à chaque étage avec précautions d’usage rédigées en 4 langues, et  énumération des  8 numéros de téléphones  portables  qu’on pouvait  appeler en 24/24,  pour chaque incident potentiellement conducteur d’annulations, des plus courants comme la bête panne d’essence aux plus imprévisibles (qu’il convenait pourtant d’envisager), comme les typhons ou les décès subits du premier, second et troisième degré ( il suffirait aux participants d’indiquer le motif de leurs défections, le décès de la vieille tante de province faisant partie, par exemple,  de la troisième catégorie).

Lettre que je n’avais jamais reçue.

Evidemment.

C’est exactement dans ce genre de situations qu’on regrette de ne pas être japonais.

 (ceux qui me connaissent bien pourraient s’étonner de cette déclaration, mais en l’occurrence, c’est exactement ce que j’ai ressenti !)

Car  au Japon, on SAIT. On sait  parfaitement ce qu'il convient de faire en pareil cas.

Ah ! Si seulement  la table qui  nous séparait, l’organisatrice en chef et moi,  n’avait pas été installée à Bourges, mais à Takitomi, préfecture d’Okinawa !

 L’organisatrice en chef,  dans ce cas, devant ma bouche béante et mon air niais qui témoignaient, en ma faveur, de ma sincérité, se serait confondue en excuses hypocrites et m’aurait proposé avec ferveur et sollicitude ses services, pour atténuer  les insupportables désagréments  que l’inqualifiable erreur des services postaux nationaux avait   causés à mon estimable équilibre intérieur….

J’aurais bien évidemment surenchéri : quelle stupidité avait été la mienne, d’envisager un seul instant qu’une personne compétente comme elle eût  pu commettre une seule erreur, alors que toute la faute m’incombait, puisque c’était bien l’incurie coupable des services postaux nationaux qui était en cause, et que j'aurais dû, le subodorant,  filer me renseigner à l'agence postale de mon village  (celle qui, désormais, est ouverte une demi-heure le vendredi matin et entre quinze heures treize et quinze heures vingt-quatre le mardi après-midi) ! Comment avais-je pu être assez indigne pour oublier que  prévoir et organiser  le bien-être requis par une telle manifestation, relevait du savoir-faire de mon interlocutrice,  dont la réputation  était connue de  tous les continents ? Non, non, la faute était entièrement mienne, j’aurais dû me renseigner, et la seule réparation que je pouvais offrir, en signe de repentir sincère et d’admiration, à mon interlocutrice, serait de lui envoyer le double du courrier indigné que j’allais rédiger aux inqualifiables incompétents (sûrement des grévistes) des services postaux, dès mon retour dans ma si mal desservie patrie natale…

Bref, nous n’aurions perdu la face ni l’une, ni l’autre.
 

Mais nous étions à Bourges (France) . Donc nous avons simplement répété sur un ton impatienté, perdant ainsi encore cinq bonnes minutes, l’une qu’elle avait envoyé sa b… de f… de m.. de missive, et l’autre qu’elle ne l’avait jamais reçue,  cette  b… de f… de m… de  lettre.

Manière bien française de ne pas perdre la face, certes, mais quelque peu stressante et inefficace…

Et puis je suis entrée sous le porche, rouge de honte d’avoir ainsi fait attendre « tout le monde »,   et me suis enfin  retrouvée quelques minutes plus tard assise parmi tous ceux qui attendaient, depuis une demi-heure,  d' entrer dans l’amphithéâtre où l’on allait procéder à l’élaboration des groupes des six ateliers de la semaine.  

 Ce fut là qu’entrant à la queue leu leu,  6 personnages  en quête d’apprentis nous firent face….

Je n’en reconnus qu’un, celui à cause duquel j’étais là : Hervé Le Tellier. Les autres m’étaient inconnus, mais je me suis doutée  cependant que j’avais devant moi la crème de la crème, car quelques applaudissements, discrets mais efficaces, saluèrent leur présence devant notre parterre…

 

(suite, ou plutôt  aveux supplémentaires, à demain).  

 

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