Payer l'addiction...

 Par nature, je suis  addictive. Enfin, comme on dit aujourd'hui. Au 17è siècle, on aurait peut-être parlé de "fidélité", au sens de clientèle et de loyauté...

En tout cas, tombée dans les pièges de l'addiction (c'est-à-dire de la facture qui est toujours brandie, à la fin), je ne connais qu'une manière de m'en sortir. Celle de la louve qui, prise au piège, consent à se séparer de sa patte, en échange de sa liberté.

Au Québec, un jeune animateur de pourvoirie, afin de justifier les modes de chasse actuelles, a un jour enfermé mon poignet (qui, du coup, était si menu, étroit et fragile qu'on aurait dit une patte de sauterelle) dans un "nouveau piège", entendez un piège à loups mais  caoutchouté de manière à ne pas blesser l'animal pris. Je n'ai pas osé, tant  le discours du jeune homme était empli de sincérité et de passion pour les animaux qu'il disait côtoyer tous les jours, lui demander si, malgré l'absence de douleur physique ,  certains continuaient néanmoins à préférer la mutilation. Il m'aurait répondu "non", convaincu. Je suis certaine du contraire. C'est ce qu'on appelle "y laisser des plumes". C'est la loi.

J'ai donc rogné ma peau, entaillé mes veines et scié mes os, mais j'ai décidé d'arrêter de fréquenter la République des Livres. Une de mes plus grosses addictions. Il y a quelques jours, un des participants à ce blog littéraire a été enterré, et son départ a reçu des hommages mérités. Je n'en attends pas tant : je sais que sur ma tombe virtuelle (car mon dernier commentaire était un adieu) tomberont très certainement trois roses, et vingt brouettées d'indifférence ou de méchanceté. Peut-être mon départ est-il aussi ma manière de saluer le disparu ?

J'ai un jour dit à un jeune médecin (j'impressionne toujours les médecins, je m'en suis rendue compte à leur empressement à me prescrire tout ce que je peux bien leur demander) que ma seule addiction, en réalité, était Clopin. Je disais ça en souriant... Mais pour le prouver, ne faut-il pas d'abord que je me débarrasse de toutes les autres, grandes et petites ?

Comme les apnéistes, le sevrage s'opère par palier, quelque soit l'addiction à traiter : disons que je vais commencer par me contenter de lire le Magazine Littéraire, et de m'emporter, comme il m'arrive si souvent, contre les opinions qui y sont émises et le style vulgaire et manichéiste avec lequel on y  exècre certains auteurs. Mais je ne porterai plus mes indignations "là-bas" : c'est le début du traitement !

 

Et nous verrons bien si mes démangeaisons littéraires survivent à l'abstinence, et à la réflexion...

 

 

 

 

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