Billets

Soupirs divers et variés...

Premier soupir : dire qu'il y a cinq ans de ça, j'aurais pu, à mon âge, être déjà (enfin) partie à la retraite (mot magique, paré des mille feux de ma convoitise)... Et que me voici bloquée jusqu'au moins décembre 2017... Impression qu'on m'a volé du temps. Que je fais du rab. Que quelqu'un, quelque part,  doit me revaloir ça !

 

Deuxième soupir : dire que je ne pourrais certainement pas aller au "banquet Shakespeare" de dimanche prochain, à Blangy-sur-Bresles, parce que Clopin a envie-besoin d'air, et que nous partons pour une semaine à Marseille. Voyage caressé depuis quelque temps, toujours reporté, et qui, je l'avoue, me laisse dubitative : Marseille, en avril ? En tout cas, je ne me vois pas imposer à Clopin de rester une journée de plus, même si j'ai très envie d'écouter les sonnets du grand William (en anglais, mais il paraît qu'il existe un traducteur !) ; bah, peut -être y'aura-t-il une célébration aussi à Marseille, parce que ce n'est pas tous les jours qu'on commémore à la fois la naissance et la mort d'un génie humain...

 

Troisième soupir : la maison est dans un état de saleté qui, ça y est, a atteint ma limite supérieure. Clopin lui-même a reconnu ce matin qu'il fallait s'occuper de la douche, et doit l'avoir fait briller cet après-midi (je verrai ça en rentrant), n'empêche que je me connais : je vais craquer et empoigner la serpillère à mon premier moment de libre... Et ça, c'est déprimant...

 

Quatrième soupir : mais qu'est-ce que je fous enfermée, alors que le soleil brille et que mon chien, qui me regarde intensément (des fois que je prononce le mot mogique "onvasepromener"), pense exactement la même chose que moi ?

Mon avenir assuré ?

 

D'après un vieux pote, paraît que je vais finir speakerine à FR3 :

 

http://www.beaubecproductions.fr/pages/filmsrealises/journal-de-tournage.html

 

 

Maman ? (dédié à Clopinou...)

Quoi ma mère ?
Qu'est-ce qu'elle a ma  mère  ?
Quelque chose qui ne va pas ?
Elle ne te revient pas ?
Oh je sais que tu n'as rien dit
C'est ton œil que je prends au mot
Souvent un seul regard suffit
Pour vous planter mieux qu'un couteau

Quoi, ma mère  ?
Qu'est-ce qu'elle a ma mère  ?
Si tu veux t'la payer
Viens je rends la monnaie
T'as rien dit tu l'as déjà dit
On n'va pas y passer la nuit
Ma mère  et moi on est d'sortie
On cherchait plutôt des amis

Quoi, ma  mère  ?
Mais qu'est-ce qu'elle a ma mère  ?
Quoi, ma mère  ?
Qu'est-ce qu'elle a ma mère ?

Quoi, ma mère  ?
Qu'est-ce qu'elle a ma mèe  ?
Oui elle a une grand'mère
Oui elle me fait la mère

Elle s'imagine que j'lui dois tout
Sans elle je n'aurais jamais plané
Sans elle je n'vaudrais pas un clou
Ma mère  a bien l'droit de rêver

Quoi, ma mère  ?
Qu'est-ce qu'elle a ma mère  ?
De galères en galères
Elle a fait toutes mes guerres
Chaque nuit blanche, chaque jour sombre
Chaque heure saignée y est ridée
Elle ne m'a pas lâché d'une ombre
Quand j'avais mal, même qu'elle pleurait

Quoi, ma mère  ?
Mais qu'est-ce qu'elle a ma  mère  ?
Quoi, ma mère  ?
Qu'est-ce qu'elle a ma mère  ?

Quoi, ma mère  ?
Qu'est-ce qu'elle a ma  mère ?
Je m'en fous qu'elle soit belle
Au moins elle est fidèle
C'est pas comme une que je connais
Une qui me laisse crever tout seul
Mais je n'veux même pas en parler
Une qui se fout bien de ma  mère.

Moi et hervé le tellier

 

J'aurais dû m'en douter : un livre qui s'appelle "Moi et François Mitterrand" ne peut qu'être le  résultat  d'une mégalomanie pathologique. L'auteur, je devrais dire "le coupable", de cette oeuvre qui se veut clairement monumentale n'a-t-il donc pas appris, auprès de sa mère, qu'on ne disait pas "Moi et... " mais bien plutôt "... et Moi ?" Et même, en poussant plus loin, ne devrait-on pas éradiquer cette majuscule qui semble d'autorité  mettre à égalité l'auteur avec celui  qu'il nomme ? Pour un peu, l'auteur aurait sans doute  poussé le  bouchon toujours  plus loin : il aurait mis  ce "moi" en majuscules :  "MOI",  et  n'aurait laisé  au pauvre ex-président que le "F" et le "M" à parité, rabaissant toutes les autres lettres aux minuscules : "MOI et François Mitterand", voilà sans doute ce qu'il voulait vraiment, et je devine que c'est son brave éditeur qui a dû lui faire entendre raison, sans pour autant arriver à lui faire abandonner toute la tentative : voici donc un "Moi et François Mitterrand" scandaleusement assumé.

 

Un peu comme si j'écrivais "MOI et Hervé Le Tellier", si vous voyez ce que je veux dire. Ou pire, encore, allons-y gaiement : "MOI et hervé le tellier", en minuscules. Oui, je pense qu'en fait c'est le traitement qui convient pour cet auteur : le traiter dorénavant, et à chaque occasion, en minuscule.

 

Parce qu'on ne peut pas sérieusement laisser faire cela. Un livre pareil, veux-je dire. Qui se lit si aisément qu'en une demi-heure, le voilà fini, alors qu'on pourrait s'attendre tout de même à quelque chose d'un peu plus indigeste, qui vous résiste un peu, je ne sais pas moi, "la phénoménologie de l'esprit" par exemple. Mais on se doute bien que l'auteur se gausse de tout cela, d'Hegel comme du quart, et que, s'il se hisse résolument au-dessus des partis (pris d'en rire), ce n'est pas pour redescendre vers de l'abscons (s'emmerde ici).

 

D'autant qu'en prime,  les  zigomatiques sont sollicités à chaque page. Je vous demande un peu. Est-ce que nous sommes ici, dans cette France anéantie par le laxisme bien connu de nos élites républicaines, est-ce que nous sommes ici, je vous prends à témoin, Monsieur "hervé le tellier", pour rire ? Mmmmhhhhhh ?

 

Non, non, je déconseille absolument cet achat calamiteux, et qui démontre clairement le mauvais esprit qui règne à l'heure actuelle dans les lettres françaises. Il nous faut franchement redresser la barre, et je crois que c'est bien NICOLAS SARKOZY qui peut seul nous montrer la voie, avec son splendide et balzacien "la France pour la vie"

 

(hervé le tellier n'aura, enfin je l'espère, pas l'outrecuidance de me contredire.)

 

9782709656269 001 x 1

 

 

 

 

l'aigreur de la madeleine (2)

En fait, il s'agissait de jeunes gens qui, perméables aux meilleurs utopies de leur temps,  et sûrement poussés par de sérieux atavismes, refusaient l'ordre matriarcal. Celui des trente glorieuses : télévision d'état, aux forts accents gaulliens, et tables en formica, "plus propres". Mères aux plumeaux et aux idées conformistes. Couples indéfectibles, mais aussi divorces calamiteux, pour certains : en tout cas, de quoi rendre difficile, pour ces frêles jeunes gens que l'esprit du temps poussait en avant, à qui l'on demandait d'être sûrs d'eux, le passage à l'état d'homme...

Sur ce terreau commu, réduit au minimum; les affinités s'enclenchaient. Un Jim, un Clopin, un Dominique P., un Baudruche aussi : tous revendiquaient d'avoir autre chose à faire de leur vie qu'à la perdre en travaillant. Tous avaient en commun une vague vision hédoniste de l'univers, telle qu'elle s'épanjouirait ensuite, enterrant sous elle les idéaux collectifs de 68. Mais pour eux, cet hédonisme cédait le pas devant l'urgence à refuser la place sociale assignée. Ne pas manger tous les jours à sa faim, quitte, mais ne pas entrer dans les bureaux. Préférer résolument, aux soins de l'apparence, les acquisitions culturelles...

Le pire de tous, dans le genre, était bien entendu Jim. Capable de négliger son corps jusqu'à un point presqu'inadmissible pour le commun des mortels, s'il s'agissait de compléter sa discothèque. Clopin, lui, attiré par la frugalité écologiste (qui entrait en résonnance avec la solide parcimonie brayonne, toute droite issue de ses grands parents petits artisans) , commençait à rêver d'autacie. Dominique P. repoussait encore et encore ses limites de résistance au manque d'argent, avant de s'engager, presque par hasard dans la voie où ses solides qualités scientifiques allaient enfin s'épanouir...

Mais il y avait en commun, derrière tous ses parcours, comme une difficulté à faire entrer la gent féminine dans le rayonnement de leurs vies. La plupart n'étaient carrément et clairement pas intéressées. Et les Ophélie du temps, les rêveuses qui pouvaient être cependant, malgré le négligé, le manque d'argent, la saleté parfois et les idéaux disons nettement anticonformistes, marquer à ces jeunes gens de l'intérêt, leur inspiraient en vrai des craintes prononcées : peur d'être mangés tout crus, comme leurs pères, ou rangés, comme on range les balais dans le placard, ou tondus : or, ces jeunes gens tenaient autant à leurs cheveux qu'à leurs idées...

Je pense qu'en fait, tout a changé cinq ou six ans plus tard, avec l'apparition, enfin, de mouvements féministes radicaux, qui cherchaient tout autant à changer la vie, à déboulonner l'image des mères et à passer à la loupe les actes du quotidien que les jeunes gens en question cherchaient à tracer une voie qui leur fûr propre.

 

Mais le mal était fait : malgré la solidarité immédiate avec les revendications des filles, malgré l'intérêt que les mouvements féministes, et le terreau de revendications égalitaires qui les formait, pouvait susciter chez eux, il n'empêche que la méfiance était en réalité de mise, et un certain manque de spontanéité. ON leur avait asigné un rôle de mâle qui avait tout du prédateur. Ils voulaient bien se rogner les griffes, certes, mais n'étaient pas sûrs,ainsi, d'assouvir véritablement leurs appétits...

 

Ce sont ces sept ou huit ans qui ont séparé la génération des Jim, CLopin, et autres, de  ma génération, qui explique en grande partie le mouvement qui pousse certains de ces aniciens jeunes gens à venir, encore maintenant, frapper à la porte de Clopin. Ils ne savent pas qu'en réalité, derrière cette porte, je suis là : ma simple présence est inhibante, pour eux qui ont tant besoin, quarante ans plus tard, de se plaindre. Devenus pères, et à leur tour divorcés, ils se sentent dupes, et cherchent auprès de Clopin comme une résonnance à leur désarroi : n'était-il pas affublé, peut-être de la manière la plus significative de tous, d'une mère "impossible", castatrice et régnant sans partage sur un océan  d'objets, qu'il convenait de passer sa vie entière à entretenir ?

 

J'ai bien écouté Clopin expliquant à Dominique P. que, certes, il aurait pu passer sa vie sans un sou, libre d'aller et de venir, accumulant expériences et promenades, nez au vent... Mais, à la naissance du premier enfant, Clopin a choisi d'assurer la sécurité matérielle. Certes, quelque part, sa mère en lui gagnait. Mais il n'était pas perdant pour autant, enfin, ce me semble.

 

Ce qui par contre me pose question, c'est ce que vont devenir les fils de ces pères-là. Dominique P.  n'est pas loin d'un discours mysogyne digne des années 50, et le moins que l'on puisse dire est qu'il ne retient pas ses chiens. D'autre part, ce bingt-et-unième siècle dégouline de la violence faite aux femmes, dont le sort est devenu l'enjeu d'invraisemblables barbaries...

 

Que deviendront les fils des vieux potes de Clopin ?

 

(suite plus tard)

 

 

L'aigreur de la madeleine...

La récente visite de Dominique P., dimanche dernier, me turlupine... Encore, me direz-vous ? Il ne s'agit pourtant que d'un vieux pote de Clopin, dont le chemin s'était écarté depuis longtemps, et qui a souhaité reprendre contact. Finalement, suis-je même véritablement concernée ?

Et pourtant, je tourne encore autour de cette visite, à cause des sentiments pour le moins mélangés qu'elle a provoqués chez moi, et surtout parce que j'ai eu comme une impression de redite, de déjà vu.

Ce n'est pas la première fois, en effet, qu'un "vieux copain", divorcé, accompagné d'un fils, vient rendre visite à Clopin. Pas la première fois que je ressens cette sorte d'étonnement mêlé de tristesse, devant ce qu'un père peut laisser échapper, devant son fils, d'humeurs aigres, de petits jugements mysogynes, de mouvements de révoltes amers... Dominique P. est bien trop cultivé et intelligent pour "passer la mesure" - mais il y a quelques années, un autre, disons un certain JF, a également franchi notre porte - et celui-là était si bête, et si catégorique dans des propos accablants, sans qu'il s'en rende compte, qu'il n'avait pas fini vraiment la soirée. Disons que j'avais commencé sérieusement, au bout de deux ou trois heures, à me demander comment j'allais poliment le mettre à la porte...

Je ne supportais plus que cet homme, devant son gamin d'une douzaine d'années, cherche une sorte de complicité avec Clopin, sur le thème "la mère est une salope".  Je n'avais aucune envie de juger ces propos, ni sur la forme, ni sur le fonds. Je voulais juste que l'enfant, qui était AUSSI le fils de cette mère, donc, arrête d'entendre ça. J'avais fini par interpeller JF, en lui rappelant que cette "salope", il l'avait suffisamment désirée pour lui faire un enfant... JF était d'ailleurs lamentable dans son argumentation. Il brandissait, comme justificatif à ces termes insupportables, que c'était "la vérité" : et puisque c'était "la vérité", son fils était bien entendu tout-à-fait apte à l'entendre... En grattant un peu, on se rendait d'ailleurs compte que la saloperie en question, (outre le fait de s'être barrée, mais là, franchement, je me sentais comme une solidarité qui montait, qui montait...) étiat surtout, de la part de cette mère, d'oser réclamer une pension alimentaire au père. Celui-ci tempêtait devant Clopin : "moi je veux bien le garder à la maison, le gamin, vu que je suis quasiment en autosuffisance, mais pas question de payer quoi que ce soit, de toute façon je n'ai pas de boulot, pas l'intention d'en chercher  et pas un rond, alors, elle peut toujours courir cette salope, mais tu te rends compte, on ne me le laisse pas garder, y'en a vraiment que pour elles, alors moi je me suis inscrit à l'association de défense des pères" ... Etc., etc.


 

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Pas de printemps pour D.P. ?

 

Il arrivait à JIm et Clopin de citer le nom de Dominiqu P., dans leurs conversations, et le plus souvent avec une certaine considération. Ceci, joint à quelques photo d'albums où l'on voyait les compères, encore très jeunes, promener de longues figures sérieuses, façon "jeunes philosophes se mettant en scène pour la postérité", avait contribué à faire de D.P, pour moi, une figure à la fois un  peu mystérieuse et lointaine. C'était un "copain perdu de vue", dont on savait juste qu'il était devenu un scientifique au service du Savoir avec un grand S., et qu'il avait, dans sa jeunesse, fait les 400 coups soixante-huitards. Mais qui il était vraiment, quelle était sa vie, ses amours, ses passions - ça, je ne posais pas la question, puisque j'avais intégré que ce ne serait jamais une mienne connaissance.

 

Et puis les détours de la vie ont amené ce même D.P. à Beaubec, ce dimanche de Pâques. Sacrebleu : cela devait faire la seconde fois, en quarante ans au bas mot, qu'il y mettait les pieds. Sa figure, que je ne connaissais guère que par les photos et deux ou trois rencontres fortuites entre Jim ou Clopin et lui, au détour de rues rouennaises, était restée aussi longue que dans mon souvenir. Mais le temps avait greffé des traits quelque peu gaulliens à ce profil-là.

 

D.P. a dû reprendre le fil là où il était brisé, et donc nous "raconter sa vie", à grands traits bien sûr. Et rien de ce qu'il racontait ne correspondait aux quelques divagations que j'avais accrochées à son nom. Sa vie s'était déroulée à l'ombre exclusive de son travail (sa passion pourrait-on mieux dire), c'était quelqu'un dont la formation intellectuelle scientifique, évidente, l'amenait à être tout factuel, sans analyse psychologique ni surtout sentimentale, quelqu'un qui, disposant désormais, après une vie professionnelle menée jusqu'à la dernière limite (65 ans), de loisirs que la continuation désormais bénévole de sa passion ne remplissait pas tout-à-fait, tentait de renouer des contacts : bref, un homme certes intéressant, mais "une vie comme une autre"...

Ce n'est donc pas de la déception que j'ai ressentie, ça n'irait pas jusque là, mais comme une sorte de curiosité rétrospective et... près d'être éteinte aussitôt que née. Les quelques phrases assez amères sur la gent féminine, l'exclusivité de cet homme sur son tout jeune fils (12 ans...), son autocentrisme m'ont très vite amenée à "changer de focale" : le D.P. qui était devant moi n'avait rien de féministe, au contraire. Quelle idée de revendiquer que son fils "ne fasse pas de bisous, car quand on est un homme on n'en fait pas" (???), quelle horrible réflexion de dire à son fils "que tout ce qu'il avait de bien, ça venait de lui, son père", et quelle incapacité à rire d'une ou deux blagues que j'ai osé lancer, et qui pourtant étaient, à vrai dire, assez drôles...

Et puis je me suis reprise, sur cette sévérité que je sentais monter en moi envers le vieux copain retrouvé de Clopin. Qui suis-je pour juger ainsi autrui ? Et surtout, je n'ai pas connu D.P. dans son printemps : peut-être aurions-nous sympathisé "tout de même" ? Peut-être est-ce la vie qui a durci, en même temps que  ses traits physiques s'amollissaient, un caractère peut-être enjoué et ouvert, autrefois ?

 

Et peut-être suis-je à mon tour trop vieille pour accepter, sans morale, de rencontrer quelqu'un de vraiment très différent de moi...

 

Allez, pas de printemps pour D.P. ne veut pas dire que je ne luis souhaite pas un bel automne. Et un fils toujours aussi aimant à ses côtés !

 

Devinette

Finalement, le seul truc qui est sans prix, sans nation, sans frontières, sans guerre, sans crime, sans effort et sans barbelés...

C'est quoi ? Le bisou ?

Oui, et l'oiseau. Aussi.

 

Rienqu a copier

 

(quand j'étais petite, je faisais des tas de trucs comme la petite fille ci-dessus. Aussi.)

L'homme aux tricots

Cette nuit, le printemps a commencé. Et j'ai fait le rêve suivant :

 

Une grande salle était en préparation : un marché allait avoir lieu. Et je devais y participer - j'avais des livres à vendre. Je ne sais si c'était des livres que j'avais écrits, des livres qui m'appartenaient ou des livres dont je devais simplement faire commerce : je devais trouver l'endroit où m'installer pour les vendre, c'était cela l'important. D'autant que le premier stand auquel je m'adressais me refoulait. C'était J.D. (l'historien qui intervient dans le documentaire, dans la vraie vie)  qui m'expliquait qu'il n'y avait plus de place, puisque ce stand était celui de l'éducation nationale : je devais en trouver un autre.

J'arrivais alors dans un endroit beaucoup plus humble, où une femme inconnue m'accueillait aimablement : oui, ici, je pourrai m'installer, me disait-elle. Mais, contnuait-elle en soupirant, il ne fallait guère que j'espère vendre  quoi que ce soit, et surtout pas des livres ! L'endroit était consacré à une sorte de "fourre-tout", et les quelques rares  clients venaient surtout pour aheter des légumes, que la femme était d'ailleurs en train d'installer...

Je cherchais cependant l'endroit le mieux placé pour moi, quand "il" entra dans le grand hall bétonné et froid qui servait de cadre à mon rêve. "IL" : j'ai su tout de suite que c'était vers lui que mon rêve me menait. Et c'était une brute. Un homme très grand et très large, dont je n'arrivais pas à saisir le regard, et qui répandait autour de lui une sorte d'onde glacée. Je savais que cet homme avait commis des crimes, et qu'il s'en réjouissait ! Et qu'il n'avait aucune crainte, aucune peur : rien ne lui arriverait, à lui. L'homme s'est installé dans le stand à côté du mien, et a commencé à aligner, sur son comptoir, des pulls. C'était sa couverture, me suis-je dit aussitôt : il fait semblant de vendre des tricots...

Je ne voulais pas de lui : il m'inspirait une répugnance infinie, et je devais le combattre... J'étais en colère, et je devais faire quelque chose. Alors j'ai attrapé la pile de tricots qui attendait son tour, et je suis partie en courant : dans un coin de parking, à côté de la béance d'une ouverture d'escalier, j'ai laissé tomber les tricots par terre : histoire de bien montrer que je n'avais pas peur de lui, et que je méprisais son commerce.

Mais je savais qu'il s'en fichait absolument. C'était pour moi, pour me surveiller, qu'il était venu au marché. Il allait juste s'emparer de cette histoire de tricots pour justifier ce qu'il allait me faire, et qui était horrible, je le savais par avance... J'avançais néanmoins vers lui, quand je me suis retournée  : derrière, dans le coin de parking, une mère et ses enfants contemplaient les pulls et les écharpes étalées par terre. Et une petite fille étendait déjà la main...

J'ai crié "stop ! Ne touche pas à ça !" Mais c'était trop tard. Et me voici en train d'attraper une cagette, de discuter avec la maman pour tenter de lui faire comprendre que ce n'était pas une bonne idée de porter ça - et je ramassais les pulls, les disposais dans la cagette : je savais qu'il fallait que je les rende à  la brute, même si cela ne changeait rien pour mon sort, qui était déjà scellé... La femme n'était pas d'accord, c'était une femme qui ne comprenait ni ce que je disais, ni qui j'étais, elle pensait que les pulls étant par terre sa petite fille avait eu raison d'en prendre un, elle me rejetait car je ne pensais pas comme elle, et moi je me dépêchais, vite vite, il fallait que je rende sa marchandise à la brute, sinon quelque chose de terrible allait se passer...

Je revenais près de la brute malfaisante et humblement, je lui rendais la cagette. Il souriait méchamment, ses yeux étaient vides, il ne me regardait pas mais contemplait les pulls. Il en a sorti un de la cagette, et, se retournant vers moi, m'a sèchement interrogée : "Quelqu'un d'autre que toi a touché ce pull. Dis-moi qui c'est - de toute façon, je saurai qui c'est..."

C'était si effrayant que les gens se sont rassemblés autour de  l'homme et moi, pressentant qu'il allait se passer quelque chose.  J'aurais dû me sentir protégée, mais je savais qu'il n'en était rien. On pouvait bien être des dizaines face à l'homme aux tricots : c'était lui qui avait le pouvoir.

Je devais parler, mais ma bouche était si sèche que... je me suis réveillée.

Le rêve était encore tout autour de moi, mais je pouvais mettre des mots dessus. Parce que je venais de rencontrer ma mort...

Ma mort est un homme aux tricots.

Cela pourrait-il m'étonner ???

 

 

Ah bon ?

Eh bien, il semble que "les éditions du net" aient mis en ligne mon petit recueil de nouvelles "histoires familiales et nombreuses", sur Face Book. Le lien est ici :

 

https://www.facebook.com/editions.dunet/app/251458316228/?app_data=!%2Fp%2F59088124

 

Mais du coup, je pense à la famille, aux amis qui l'ont acheté, ce livre, soit en papier soit en le téléchargeant... On verra bien, de toute façon, j'ai si peu d'amis sur Facebook que je ne m'attends guère à faire péter l'audience, ni le nombre de lectures. En fait, je ne sais pas trop quoi penser de cette initiative des éditions du Net. Est-ce bien légal, tout ça, mmmmhhhhhh ?

 

Bon, on va dire que mon fatalisme, bien rôdé en la matière, va me permettre de m'en fiche un peu !!! Mais cependant, si d'autres que moi sont dans ce cas, leur opinion m'intéresse...

Combien d'années ?

trouvé sur le web, ce souvenir (de "Brigitte  Célerier") :  "(je me souviens d') avoir pris un petit avion marine (et d'être montée dignement en jupe devant tout l'équipage, j'avais seize ans timides)".

 

Ce que j'aime ces "seize ans timides"...

 

Ca débouche évidemment sur la question : combien d'années timides avez-vous vécues ?

Je ne peux évidement répondre pour moi-même (qui se connaît assez pour cela ?), m'enfin je dirais :

- pour Clopin = 0

- pour Jim = 57

 

ahahah.

Dicton pour les jours sans...

"Mes saucissons mentaux sont coupés en rondelles,

Car mon psy, ce salaud, n'fait pas dans la dentelle."

 

proverbe express pour le premier jour de mars (et ça repart).

Pourquoi je dénonce les trolls...

A cause de la haine qu'ils trimballent. Ce matin, suite à un billet d'Assouline sur les droits des écrivains, j'ai posté un texte qui me faisait sourire en l' écrivant, comme j'ai souri, il y a quelques années, en lisant la plainte d'un journaliste de télérama qui se disait fatigué par le rythme du festival de Cannes : je lui avais gentiment (enfin, je crois que c'était gentil !) que ce genre de fatigue n'était cependant pas accessible à tout le monde... Bref, ce matin, j'ai commis un petit texte de ce genre, rien de bien original je le veux bien, mais rien de méchant non plus...

 

Réaction du troll : (les citations en italique sont des copiécollés de mon message posté plus tôt)

 

Trouille au Fou dit: 25 février 2016 à 11 h 32 min

« billet que j’ai eu le plaisir de lire plus tôt que tout le monde ici ». Mais qu’est-ce que t’en sais au juste ?… Nature de ce ‘plaisir’ ?
« M’enfin, eux, ce sont des écrivains, des vrais ». Heureusement, pasque comme t’en sera jamais une (ni même une fausse) vu que t’as aucun talent, pas la peine de te solidarises avec leur cause cégétiste, y a déjà assez de chomdu comme ça.
« A ma place, quoi ! » Euh… quand y a rien du tout que ton ego qui se branle au clair de lune, pas difficile de remplir le reste ni surtout de le remplacer. Remplis ton blog de m., viens pas la ramener pour dégoiser tes clopineries insignifiantes.

 

La haine, je vous dis. Et le tout dans l'impunité de la lâcheté... Et l'on voudrait me faire croire que les trolls sont innofensifs ?

Le problème, c'est d'avoir le niveau...

... Surtout si l'on songe que les puits de science habitent souvent les tours d'ivoire.

ALors, pour être de niveau, vaut mieux coincer la bulle...

 

Niveau a bulles

Faits d'hiver

Challenge, hiver, Isabelle :

Le jardin ne sait plus où donner de la tête, entre les chants d'oiseaux repartis de plus belle ( cette année, le silence hivernal n'a guère régné, et pour cause... ) et les bourgeons de février (!) qui font semblant de ne pas voir la neige...

 

 

Bourgeons de fevrier

La Vie par effraction (Isabelle, challenge, hiver)

 

Les petits agneaux d'hiver n'étaient certes pas programmés... Mais le bélier du voisin, lui, n'en a eu cure, des calendriers ! Un saut dans la haie, une fugue, une saillie volée : et voici, en février, d'inattendus nouveaux-nés.

Conçus par distraction, entrés par effraction, sont-ils honteux, ces moutons ?

Eh "béééééééééééé" non ! Les voici fiers comme Artaban. Ma foi, on les comprend : c'est beau la vie, même si, pour y entrer, il a fallu un peu la cambrioler...

 

Agneaux d hiver

prénom : Pascal

 «Quand on ne vous aime pas,  on disparaît. Lorsqu'on vient au monde avec le sentiment qu'on n'est rien et que le contenant ne veut pas du contenu, on s'efface. Même tout petit, on a pleinement conscience de n'être pas désiré. C'est pareil chez les animaux. A 2 ans, j'ai fait ma première dépression nerveuse.» P. Quignard. (et l'étoile se dit : "je tremble au bout d'un fil. Si nul ne pense à moi, je cesse d'exister". Supervielle.)

 

Quignard5
 

l'Agri-culture...

trouvé ça :

https://www.facebook.com/FunniestShortVids/videos/10151594983041820/

 

Et franchement, on pourrait faire exactement la même à Beaubec...

 

(au passage, remarquons la solidité remarquable du guitariste, qui ne fait pas injure à celle de son bassiste...)

 

Une des premières apparitions du tracteur-basse date de ...1923 !

Si vous écoutez bien...

... Quadn on écoute les scientifiques, eh bien, les certitudes s'écaillent. Par exemple, niveau sexualité. Parce que finalement, nous sommes tous des descendants, quelque surprenant que cela puisse paraître, d'"Homo"...

La vraie vie des vrais gens

 

Il faut prendre la voiture pour aller chercher le pain, dans nos campagnes. Ca peut paraîre anecdotique, mais c'est  dire l'importance des boulangeries, comme lieux sociaux : magré  cette contrainte,  et la redoutable concurrence des supermarchés, elles tiennent bon... Et si, désormais, l'ouverture des agences postales est totalement aléatoire, il nous reste cependant nos boulangeries... et nos couples de boulangers...

 

Mais ces derniers subissent également le changement délétère de notre civilisation. Cela devient presque un jeu (un peu méchant...), pour Clopin et moi, d'aller à la "p-tite boulange", la minuscule boulangerie la plus proche de chez nous. Les propriétaires ont changé, et c'est désormais un jeune couple, n'excédant pas 25 ans chaque, qui tient la boutique.

Eh bien, signe des temps ? Ni lui ni elle ne savent compter. Ca peut paraître étonnant, car enfin,  dans le commerce, ce n'est guère habituel,  mais c'est ainsi. Cela en devient même digne d'intérêt : ce matin, par exemple.

Il fallait additionner 3 euros quarante et un euro quarante-cinq.

De quoi s'embrouiller, pas vrai ? Alors, recours à la calculette, et voici notre boulangère qui tape laborieusement l'addition, pour annoncer enfin, après une dernière vérification, que je lui dois quatre euros quatre-vingt cinq centimes...

Mais, et c'est là que je suis cruelle, je lui ai tendu un billet de dix. Il lui a donc fallu avoir recours de nouveau à la calculette, pour déterminer que 10 euros moins quatre euros quatre-vingt cinq centimes, ben cela faisait cinq euros quinze centimes de monnaie à me rendre...

Et dire qu'elle ne fait que cela, toute la journée, que de vendre du pain et des "gateaus" (comme elle l'écrit sur son tableau...).

C'est sans doute un peu méchant de relever ces ignorances, qui font de ce brave couple, qui travaille dur, des sortes de victimes. N'empêche qu'on se prend à rêver de ce qu'a bien pu être leur scolarité, à ces deux-là... Enfin, je dis "rêver" :  "cauchemarder" serait sans doute plus exact...

 

 

 

Choisis ton camp, camarade !

Artaud a écrit l'ombilic des limbes... Eh bien, moi, aujourd'hui, c'est la douleur des lombes, autrement dit le redoutable lumbago, qui me vrille et me cloue au lit, comme le papillon cloué par l'entomologiste.

 

Ca a quand même quelque chose de bon : me faire prendre conscience de  l'interactivité absolue des différentes parties de mon corps. Me voici droite, sur mes deux jambes, la douleur contenue et tapie dans mon rein. J'ouvre les bras : la douleur fuse. Me voici allongée, calée, sans autre souci que mon inhabituelle attention à mes gestes. Je tourne la tête : malheureuse ! c'était justement cela, qu'il ne fallait pas faire...

 

Paraît que j'en ai pour quelques jours, seulement. Je sens que ça va me paraître long !

Me voici toute encouragée...

J'ai reçu un superbe message de mon amie Véronique Aubouy, la cinéaste qui a consacré une partie de sa vie à Proust, et qui a réalisé un film expérimental d'une beauté troublante (comme son sujet), intitulé "Je suis Annemarie Schwarzenbach".

C'est la magie du net (et de Marcel Proust) qui nous a liées elle et moi, car sans cela, je n'aurais jamais eu la chance de la rencontrer. Et c'est aussi, bien sûr, la seule vraie "pro  du cinéma" de mon entourage : c'est dire si son avis compte pour moi, et pour Clopin.

Or, elle est carrément enthousiaste au sujet "Des racines et des haies" !!!

Oh, j'entends d'ici les vilaines petites voix malveillantes qui  vont mettre son avis positif  sur le compte de son amitié  et de sa gentillesse, histoire de me décourager... Mais ce n'est pas vrai. C'est vraiment sincèrement qu'elle nous félicite, et la preuve en est : elle nous donne un conseil qui est un des plus pertinents que j'ai entendus jusqu'ici.

Pertinent, et vertigineux...

Ecoutez plutôt :

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Diverses déceptions...

Déçue par la chronique mensuelle d'Onfray, qui ne fait ni réfléchir, ni ne propose de pistes. Combien de fois déjà se sera-t-on moqué du "référentiel bondissant" utilisé en lieu et place de "ballon", ou de la "technicienne de surface" faisant tout simplement le ménage ?

 

Qu'Onfray emboîte la moquerie commune, encore, passons : peut-être, parmi ses lecteurs, y'en aura-t-il qui n'avaient pas noté ce détestable recours à l'euphémisme qui caractéristique notre langue de bois journalière, et qui donc feront leur miel de cette chronique. Mais qu'il profite de ce consensus populiste ) pour tonner contre "l'effacement du réel" qui serait là-derrière, appuyé par le travail des journalistes de télé ou de radio, voilà qui est, comment dire ? "un peu court, jeune homme".

 

Car le travail journalistique est absolument primordial si, justement et contre l'avis trop rapide du philosophe, on veut pouvoir appréhender notre monde.  On peut regretter le sensationnalisme des infos de TF1, leurs recours à  l'émotion systématique, la démagogie de la chaîne M6 avec ses sondages bidons, n'empêche qu'elles restent la seule fenêtre ouverte sur ces "étranges étrangers" dont parlait Prévert... Onfray, une fois de plus, se trompe de cible, à mon sens, et ça lui arrive de plus en plus souvent ces derniers temps.  Où est le superbe passeur qui tendait aux exclus du savoir le trousseau de clés philosophique ? Ses colères rejoignent désormais ce qu'il fustige : l'idée courte, et le manque de recul documenté.

 

car enfin, c'est la publicité qui efface le réel, et non les infos d'Arte !

 

Bref, lisez vous-mêmes le billet de janvier : ICI.

 

 

Louis et Giono...

Tout sépare ces deux-là, et pourtant : l y a dans les notes sur l’affaire Dominici l’analyse parfaite de la violence que le langage fait subir aux êtres. Gaston n’a pas les mots du juge, et Giono, qui connaît parfaitement les deux langages, le paysan et le judiciaire, note tous les quiproquos, tous les « à-côtés » qui font que l’innocent va devenir coupable.

En ce sens, (en ce sens seulement, certes, mais pourtant !) le travail d’Edouard Louis rejoint celui de Giono :   ils démontent tous deux cette violence sociale inouïe sous-jacente au langage…

Une amie qui lit la « vie catholique » (! En mémoire de sa mère !!) et qui connaît mon athéisme enraciné m’empêchant à tout jamais d’acheter l’hebdomadaire confessionnel), m’a envoyé l’interview du jeune Edouard. Notation d’icelui, que je trouve parfaitement juste (mais que je reproduis de mémoire, vous m’excuserez donc) : « la société des hautes classes sociales trouve formidable le langage populaire, ses images, ses trouvailles, son charme – mais quelqu’un qui parle comme parle le personnage de « ma soeur » dans mon livre se fait immanquablement blakbouler au premier entretien d’embauche… »

Perso, j’ai vécu cela à l’hôpital, où je partageais la chambre avec une jeune fille en droite provenance d’un foyer de la DASS : c’était pathétique, parce que la jeune fille n’avait pas l’air bien malade, et que je soupçonne qu’elle avait joué, non pas la comédie, mais qu’elle avait accentué ses symptômes (nous étions dans la section de gynécologie) pour se retrouver là et donc avoir un prétexte pour que son éducateur prévienne sa mère.

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Comment vous l'avouer ?

 

Absence

l'état des lieux

Cette maison était née d'une utopie : celle du "retour à la terre" et du rêve d'autarcie des enfants de 68. Mais si  ce genre de projets  avient inéluctablement vocation au délitement, la maison, elle, était toujours là.

Dès l'entrée en possession, les trois compères qui s'étaient unis, jeunes et sans un rond, pour l'acheter, avaient commencé les travaux. Et, en quelque sorte, ces travaux n'étaient pas terminés, ne seraient jamais terminés. Mais les deux femmes pour qui les maisons avaient été construites (car trois années avaient été consacrées à faire naître, du néant d'un champ, une impressionnante longère, plus solide, plus vaste encore que la première. Et les deux maisons cohabitaient, comme pourraient cohabiter une mère et sa fille), ces deux femmes  n'étaient plus impliquées dans cette vie interne des maisons : les travaux continuaient encore, et encore, mais un peu à la manière du canard, qui continue à courir  avec la tête tranchée...

C'était donc bien plus qu'une maison que je devais affronter. C'était une histoire, un projet, une union avortée. J'étais bien trop angoissée par mes réactions à la situation que j'avais pourtant acceptée, mais que je n'acceptais plus, (à savoir élever mon enfant loin de son père), pour comprendre que la Maison avait besoin d'une proie, pour continuer à susciter, année après année, l'élan laborieux qui présidant à ses embellissement ; ce que je ressentais confusément, par contre, c''est que je n'étais pas chez moi. 

Tout ici m'était pénible, et difficile. Je venais de passer quelque vingt ans dans la grande ville, où les portes s'ouvraient grâce à des vigicodes, où les tiroirs des placards de cuisine, munis de roulements à bille, s'ouvraient et se fermaient du bout des doigts, où la chaleur provenait de l'électricité ou du gaz, sans qu'on se pose plus de questions que cela. J'arrivais dans une maison qui gardait encore la rudesse des habitats paysans d'antan : j'avais, en réalité, tout à apprendre...

 

(suite à demain)

Rivalité (le complexe de Manderley)

Dans les années 70-80, il ne faisait pas bon évoquer, comme relevant de votre personnalité, des sentiments de jalousie ou de rivalité. La sentence tombait illico, accompagnée d'un regard méprisant : "la jalousie, c'est rien que de la peste émotionnelle chez les petits-bourgeois". On était sensés être tous égaux, libérés, en accord profond avec nous-mêmes et désirables à hauteur égale (ce qui permettait d'ailleurs à quelques petits sournois, en loucedé, d'en profiter un maximum. Il suffisait de ne pas être trop regardant avec l'hypocrisie...). Bien entendu, à partir de là, "que le meilleur gagne" :  les plus coriaces des égocentriques remportaient souvent le morceau...

Cependant, aussi stupides et  dénuées de toute vérité psychologique qu'aient été les idéologies de ce temps-là, elles avaient au moins le mérite de tenter de changer les rapports des uns aux autres. Ce n'était pas leur faute si la réalité a la vie dure, et si les combats les plus cruels utilisent parfois, simplement, pour armes, les mots...

Ce jour-là, je remontais en frissonnant l'allée qui menait à la longère brayonne où j'étais sensée vivre désormais. A main droite, un panier, contenant un chat. A main gauche, un enfant, qui serrait ses doigts dans mes paumes, et qui était très certainement le meilleur passeport possible pour franchir le seuil de cette demeure, où on allait, sans cesse, me demander mes papiers...

Je n'étais pas d'un tempérament particulièrement jaloux. Il me semblait tout simplement que j'étais "en-dessous" de la jalousie. Je n'arrivais jamais à "revendiquer" une affection, encore moins une quelconque "exclusivité" de sentiments. Je n'étais tout bonnement pas à la  hauteur de moi-même. Alors, venir vivre "chez une autre"...

 C'était pourtant ce qui était en train de m'arriver. Je me souvenais de "Rebecca", de Daphné du Maurier, et j'éprouvais le complexe de Manderley, de celle qui n'est pas à sa place, qui n'est pas chez elle, parce qu'elle est chez l'autre. Et encore : chez Du Maurier, la première est morte, et c'est juste son souvenir qui torture la seconde. Dans mon cas, rien n'était éclairci, au nom de la bonne vieille idéologie baba qui voulait qu'on devait tout partager...

C'était tout simplement une horreur à vivre, mais cela n'était rien encore. Car il me faudrait, afin de pouvoir survivre, non seulement comprendre ce qui m'arrivait et tenter de résoudre les équations mortifères dont résultait la cohabitation, mais encore discerner que mon vrai problème n'était pas la femme qui résidait (encore) là, et qui elle aussi avait un enfant de l'homme qui nous réunissait ainsi, sans que nous l'ayant un seul instant souhaité, toutes deux.

Non, mon vrai problème, mais je n'allais l'apprendre que petit à petit, c'était elle.

Elle.

La maison.

Cette longue longère au lourd  toit d'ardoises d'un bleu-gris changeant, ces murs de torchis, ces  fenêtres fermées de volets de bois, ce jardin potager qui s'étendait à droite et à gauche de l'allée empierrée comme une déclaration, cette porte massive, peinte en bleu et fermée à clé, car il fallait passer par une autre porte pour entrer : elle me regardait arriver, cette maison-Manderley, et si je ne l'avais pas pressenti, elle allait bien entendu mettre les choses au point : car ma vraie rivale, c'était elle.  

(suite à demain)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un chien en hiver

Promenade hivernale avec Ti'punch, ce matin. J'ai vu, il y a des années, des dessins de jeunesse de Van Gogh qui étaient caractéristiques de cette ambiance : la froidure, les tons assourdis, quelques flocons de neige, les flaques luisantes et grises... Et un chien batifolant à loisir là-dedans, levant les lièvres et guettant les écureuils...

J'ai toujours un peu pitié de ces maîtres qui ne peuvent se passer d'une laisse, en promenade, comme s'ils craignaient une fuite. La relation entre mon remarquable chien et moi-même est bien plus forte que n'importe quel collier, n'importe quelle laisse. Et c'est de lui-même, désormais, sans que j'ai même besoin de le rappeler, que Ti'Punch revient vers moi pour se faire attacher (symboliquement, je me contente souvent de poser la main sur lui, et il reste ainsi immobile), quand un piéton ou un cycliste nous croise...

 

Je repensais à ce lien exceptionnel qui relie le chien à l'homme, hier, en revoyant, chez des amis, notre premier documentaire "la Bergère et l'Orchidée". Cinq ans ont passé, mais le portrait de Jeanne a gardé sa fraîcheur. Et je suis toujours aussi épatée par sa prestation : elle marche, devant, à son rythme, le bâton à la main. Toute la troupe "ed'moutons" suit derrière, comme un seul homme. Pas un qui déborde, qui la dépasse, qui s'égaille à droite, à gauche. Certes, il y a les chiens, qui travaillent avec elle, et contiennent le troupeau. Néanmoins ! Quiconque a eu affaire, même une seule fois, à quelques moutons, ne peut qu'être impressionné par la maîtrise absolue de cette femme, silouhette engoncée, l'hiver, dans une doudoune unisexe qui la rend comme invisible, alors que c'est l'acuité de son regard, sa relation aux bêtes, son endurance et sa fabuleuse maîtrise qui sont les seuls garants de son troupeau...

Dans le film, il y a une scène où un de ses chiens déclare son amour à Jeanne, qui en est presque gênée devant la caméra. C'est ce genre de modestie affective qui me va droit au coeur - portée, en plus, par un regard d'un bleu céleste,qui éclaire d'un seul coup un visage passé, ridé mais souriant...

Non, Clopin a raison, nous n'avons pas à rougir de ce premier essai. Si c'était à refaire, seule la construction du film serait bien plus soutenue. Mais Jeanne continuerait à l'éclairer de l'intérieur...

 

(à part ça, Clopinou a été tellement abasourdi de ce qu'il lit, sur les réseaux sociaux, à propos d'Edouard Louis, qu'il a décidé de répondre et de défendre le jeune auteur. Clopinou, c'est mon fils à moi ça.)

 

Signe Extérieur nuit...

 

Entendu Delphine Horvilleur, femme-rabbin, sur France Cul ce matin : "toutes les religions ont des signes ou des symboles, mais la valeur de ces signes n'est pas la même. La kippa est un signe parfaitement compatible avec les valeurs universelles, puisqu'elle signifie que l'Homme est petit devant Dieu, avec  majuscule, c'est-à-dire avec l'acceptation "être humain qui croit en dieu". La burqa, elle,  signifie que la femme est petite devant l'homme. Ele n'est donc pas compatible avec les valeurs universelles..."

Quand le journaliste bronche et lui demande alors pourquoi les femmes juives se voilent-elles les cheveux, si ce n'est en signe de soumission aux hommes, Horvilleur botte en touche : "oui, c'est vrai, il faut que les religions, et pas seulement le judaïsme, revoient la place qu'elles accordent aux femmes, et plus généralement la place faite à l'altérité (homosexuels, convertis, étranger)"...

Je trouve que tout ceci est spécieux. La grande majorité de mes collègues, par exemple, portent des croix catholiques, solidement accrochées à leur cou et apparentes (par-dessus les vêtements). Si l'on accepte ceci, pourquoi refuser cela ?

La burqa est interdite dans l'espace public. J'aurais comme une tendance à interdire tous les signes religieux, sans distiinction. Et s'il existait un signe, un symbole d'athéisme, l'interdire aussi par là-dessus.

Parce que ce que je crois ou ne crois pas n'appartient qu'à moi... Et que si j'ai le droit d'exprimer mes croyances ou incroyances, je partage l'espace public pysique. Cet espace devrait donc être, dans mon esprit, dégagé de toute expression ostentatoire des uns ou des autres...

Quant à l'espace public immatériel... Ah là là... Ce vaste foutoir qui, au nom de la liberté d'expression, permet toutes les dérives... Il pose le problème le plus crucial de notre temps, à mon sens, et je n'ai aucune réponse valable à apporter, sinon le respect strict de la loi en la matière. Loi bafouée tous les jours que le bon dieu ne fait pas !

 

 

 

 

 

 

 

Du danger des invitations...

Je devrais commencer à me préparer pour le week-end de l'ascension 2016. Or, je n'en fais rien. Je m'étais promis, pourtant, de mobiliser bon gré mal gré Clopin ou Clopinou, voire n'importe quel passant de Beaubec me tombant sous la main, pour "tester" la prestation que m'a demandée Véronique Aubouy, dès le mois de décembre, ou pendant les fêtes. Et nous voici à mi-janvier - et je n'ai même pas encore rouvert mon vieux pléïade à la couverture toute pourrie désormais...

Il s'agit pourtant d'un truc absolument fabuleux pour quelqu'un comme moi  : à savoir que je dois  jouer, en mai prochain, le rôle de "narratrice", en quelque sorte, dans un film sur Proust et les châteaux aristocratiques, film  qui doit être tourné à Trévarez, et pour lequel Véronique a eu la gentillesse de penser à moi.

C'est un vrai cadeau, parce que Trévarez, c'est CECI  (excusez du peu !), et que je suis sensée raconter un épisode de Sodome et Gomorrhe, la soirée chez la princesse de Guermantes où le narrateur n'est pas bien sûr d'être invité...

Or, c'est une scène qui me va bien, parce qu'au fond, moi non plus je ne suis pas bien sûre d'avoir été invitée... Non à une soirée mondaine,  mais bien plus fondamentalement : à la vie, tout simplement. A vivre...

Nous sommes quelques uns dans ce cas, qui nous rend parfois difficiles à comprendre aux yeux des autres, des légitimes... 

J'emploie le "nous" : il me semble en effet qu'il y a là comme une communauté qui, bien que non déclarée, existe cependant. Je ressens  parfois  une sorte d'attirance-répulsion vers telle ou telle personne, anonyme ou connue... Et, comme par hasard, j'apprends souvent que cette personne, elle non plus, n'a pas reçu la bonne invitation, à son entrée dans ce bas-monde. Depardieu, tenez, en est un bon exemple. Le mélange de force et de douceur qui émane si étrangement de lui est-il dû à ce déséquilibre, qu'il nous faut sans cesse compenser ?

Allons, je ferai mieux d'arrêter de divaguer et de me concentrer sur la tâche que l'on m'a assignée. Donc, commençons : "Je dois me rendre chez la princesse de Guermantes, et je ne suis pas bien sûre d'y avoir été invitée...."

 

 

 

 

Le cadeau le plus extraordinaire...

 

Je vais vous raconter l'histoire du cadeau le plus extraordinaire jamais reçu, et un de ceux qui m'ont fait le plus plaisir, à part évidemment ceux dûs à la nature (un bébé, des animaux, des fleurs, des fruits, des arbres et des branches...).

Je l'ai reçu au lendemain d'une soirée non pas "banale" mais disons "ordinaire" - de celles qui nous arrivent parfois, ou même souvent, à Beaubec...

Ces soirées-là se passent souvent en juin, et se déroulent  sous la vigne, juste devant le potager  - enfin, je dis "le potager", mais c'est surtout une "déclaration" : pour arriver à la maison, il faut le traverser, et ce qui est signifié là, c'est déjà un mode de vie. Non que nous soyons les seuls à avoir un potager, m'enfin, nos voisins, souvent, relèguent la chose à côté, ou derrière leurs maisons, ou l'entourent d'une petite haie... Clopin, lui, l'affirme catégoriquement : sa terre produira les aliments dont nous nous nourrirons.

Donc, dans les assiettes, à Beaubec, on trouvera souvent les légumes aperçus en arrivant, et qui sont bien entendu d'une qualité supérieure à celle du commerce. Je n'en suis pas plus orgueilleuse, parce que tout cela, les tomates pleines de saveur, les fèves, les carottes et les salades, les pommes de terre et les haricots, les petits pois et les concombres, les navets et les courgettes, les légumes-racines et les légumes-feuilles, tout procède de Clopin, et si peu de moi...

Ma partie, c'est la cuisine, et avec le temps, (et le plaisir de recevoir les copains), j'ai acquis une certaine maîtrise de la chose

. Et puis c'est ma façon de donner, à moi.

Donc, ce soir-là, la table était gaiement mise sous la vigne, et nous recevions trois amis : Philippe J., et sa compagne, qui étaient venus accompagnés de leur ami Victor...

Je connais Philippe depuis trente-cinq ans au bas mot, et j'ai toujours trouvé de l'intérêt à sa conversation. Pourtant, son univers est très différent du mien : ensiegnant-chercheur en  mathématiques à l'université, guitariste accompli, motard (d'énormes motos anglaises et classieuses, la dernière était d'un vert chou très particulier), professeur d'aïkido et adepte d'une certaine réserve devant les idéologies de son époque, rien ne le rapproche a priori (sinon des utopies passées, que nous avons  vécues  ensemble) de la sorte de cas définitivement à part que je suis... Et pourtant : c'est toujours un vrai plaisir de le recevoir.

Surtout s'il vient avec sa compagne, et Victor...
 

 

 

 

 

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Les fragilités de Clopin

 

Jamais, plus qu'hier, je n'avais ressenti la fragilité de Clopin en face de la maladie et de la mort. Depuis le décès de son père, ce qui était une répugnance est devenue (presque) une phobie : hier encore, deux amies évoquaient Parkinson, ou Alzheimer. Clopin s'est enfui de la pièce...

 

Je pense que c'est d'avoir accompagné son père jusqu'au bout, perdant du même coup le statut de fils pour devenir, par obligation, celui qui prend en charge, qui ne lui permet plus d'évoquer la déchéance. Ceci, joint à la troublante ressemblance physique qu'il développe maintenant avec notre défunt Papy, m'amène à vouloir relire les sublimes pages que Proust accorde au phénomène, qui, dans la Recherche, transforme la mère en grand'mère, après la mort de cette dernière.

 

Je ne crois pas, pour ma part, (je suis même sûre du contraire) ressembler désormais à ma mère (encore moins, et pour cause, à mon père). Peut-être parce que ma mère est partie alors que j'étais encore jeune, égocentrique, en construction ?

 

Peut-être est-on plus fragile vis-à-vis de la maladie, la déchéance, la mort, quand on est un vieil orphelin ?

 

Je ne peux pas protéger Clopin, pourtant, à l'aube de notre vieillesse, de ce genre de sujet de conversation : j'ai bien peur qu'elle ne se renouvelle de plus en plus, au fur et à mesure que nous irons. Mais comment parler légèrement de ce qui est réellement effrayant ? Pour ma part,  j'ai lu  Montaigne, et suis persuadée que "La mort est le sort commun des hommes, et c'est folie de n'y pas penser, ou de le la représenter comme une chose lointaine." Mais sans doute, pour y penser journellement, vaut-il mieux le faire seule, et ne pas trop s'y attarder.

 

L'art est le seul mensonge qui dit la vérité

J'ai écrit hier cette phrase chez Assouline : elle m'avait été inspirée par la lecture de "Histoire de la violence" d'Edouard Louis - ce titre est d'ailleurs, à mon avis, assez inadéquat, et c'est à peu près le seul reproche que je ferai à l'ouvrage... Bon, une simple recherche sur internet m'a permis de constater qu'évidemment, je n'étais pas la seule à l'avoir eue : Bergson, entre autres, l'a émise bien avant moi.

 

Mais pourtant, c'est pour moi la conclusion et surtout le message du livre dont je viens de finir la lecture : parce que Louis a réussi la prouesse de dépasser, dans ce second livre, le tour de force du premier "En finir avec Eddy Bellegueule". Enfin, à mon sens, bien sûr, c'est-à-dire au point de vue littéraire, en tout premier lieu.

"En finir avec Eddy Bellegueule"  était non seulement un ouvrage "terrible" au niveau du récit de ce qui y était raconté, mais encore un livre "polyphonique" où plusieurs langages se cotôyaient : celui, trivial, violent, populaire de la famille lumpen-prolétaire du narrateur, mais aussi une langue presque savante, bourdieusienne, qui venait mettre en quelque sorte la grille d'analyse de la sociologie sur l'histoire : moitié-pansement, moitié-réquisitoire. Personnellement, je n'avais jamais vu une pareille entreprise : un tout jeune homme utiliser sa propre histoire en tentant de la comprendre par une science toute nouvellement acquise. Il y avait du savant qui s'auto-inocule un prototype de vaccin dans l'entreprise. Et une telle violence relatée, pour peu que l'on soit sensible à la souffrance, même et surtout quand elle n'est PAS revendiquée (je veux dire quand on ne convoque PAS le pathos pour provoquer la compassion du lecteur), mais simplement racontée "pour ce qu'elle est" : une sorte de malheur inévitable, ne peut que provoquer chez le lecteur un intérêt passionné (et dans mon cas, quelque peu maternel : mon Clopinou a l'âge d'Edouard Louis...)

Je n'étais donc déjà pas d'accord avec les critiques d'"En finir avec...", qui fustigeaient d'une part, la manière dont l'auteur "vendait" sa famille en racontant des "turpitudes" sur elle, et d'autre part, sur l'accusation de "racolage" qu'on formulait ici ou là : Louis aurait volontairement et avec complaisance exploité l'espèce de martyr qu'il avait subi dans son enfance pour appâter le voyeurisme du lecteur.

Il me semblait que ces critiques en disaient beaucoup plus sur la langue de bois du politiquement correct ("ne jamais dire que le populaire peut être  ignorant, violent, grossier et  mortifère, parce que c'est "le peuple") et sur les fantasmes et phobies que l'homosexualité fait naître, après des siècles de tabou ("un homosexuel est forcément un être vil dont les motivations sont bien entendu tordues, blamâbles, entre exhibition et envie d'acquisition du pouvoir"), que sur les lignes que j'avais lues, et dont l'harmonie était évidente. Quand un livre aussi dense, construit d'une manière si étonnante, se lit en plus avec une facilité qui provient de la limpidité de l'écriture, on peut sans guère se tromper estimer qu'il ne s'agit pas là de quelque chose d'intéressé ou de volontairement scandaleux, mais plutôt : d'une vraie littérature...

 

Néanmoins, c'était avec quelque inquiétude que j'attendais le second livre du jeune homme. Je savais qu'il s'y servirait d'un sordide "fait divers" dont il avait été victime. Il était évident (surtout après un épisode politique, assez malheureux et maladroit, où Louis avait tenté de censurer une conférence d'un intellectuel "de droite", ce qui n'est jamais le bon moyen pour contrer une parole. Ce n'est pas en tentant de fermer un robinet que vous empêchez l'eau de couler sous les ponts...) qu'il serait mal accueilli par tous ceux qui  avaient déjà "éreinté" le premier ouvrage...

Et ça n'a pas loupé...

 

 

 

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Au nom d'Edouard

 

Dès la parution de son nouveau livre, "Histoire de la Violence", la tempête se déchaîne. Un article absolument scandaleux dans le Magazine Littéraire, qui cumule à peu près tout ce qui se fait de pire dans le genre critique - attaques personnelles visant l'homme et non l'oeuvre, insinuations fondées sur des a priori comme la volonté de "racolage" de l'auteur, petites saloperies à droite à gauche comme de désigner l'ancien nom de l'écrivain (il s'appelait "Bellegueule" et son premier livre explique mieux que tout pourquoi il a changé de nom) comme le "vrai", affirmations gratuites (Edouard Louis ne ferait rien d'autre que "mal digérer Bourdieu", alors qu'il est carrément à l'ENS de sociologie, bref !), mépris à tous les étages (le livre ne serait qu'une autofiction pathétique, le genre de l'autofiction serait lui-même une bâtardise) : n'en jetez plus, la cour est pleine (d'excréments).

 

Je ne peux pas charger le livre sur ma liseuse, donc je ne peux rendre compte de ma lecture, je me promets pourtant d'y parvenir. Cependant, la violence des réactions me semble proportionnelle à la superbe insolence d'Edouard Louis. Transfuge de classe, il aurait pu adopter l'attitude respectueuse du prolétaire pétrissant sa casquette et baissant le nez devant "not'bon maître". Il n'en est rien : il a fustigé une conférence présidée par Marcel Gauchet - et même s'il s'est trompé d'attitude, en tentant de faire exercer une censure qui est toujours un tort, il avait néamoins raison sur le fond. Il est jeune, et il emmerde tous les homophobes de la terre. Et plus tous se déchaînent contre lui, plus il m'est sympathique...

 

Vas-y Edouard ! Et continue d'écrire EN TON NOM !!!

 

 

Hiver ?

Drôle d'hiver

Mi-vert

Envers

et contre tout :

Attente !

 

 

 

La poésie, c'est rien que du cinoche...

   Comme tout le monde, c'est à l'école que j'ai appris mes premières poésies, et c'est en classe qu'on m'a "expliqué" ce que c'était qu'un poème...

Or, plus je vais, moins je suis d'accord avec ce que l'on m'a appris. Oh, bien sûr, "de la musique avant toute chose" : ce n'est pas un professeur qui l'a dit, mais bien Verlaine ;  pas question donc de remettre ce prédicat en question. Mais cependant, le reste...

Tenez, prenons un des plus célèbres poèmes de Rimbaud : le dormeur du val. Archétype de la poésie apprise et analysée en classe (la pauvre !). C'est donc ceci :

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Qu'est-ce que j'ai appris à son sujet ?

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Il semblerait bien....

Il semblerait bien que je dispose maintenant, par la grâce de Clopin et de son fils aîné, d'un nouvel espace où déposer mes élucubrations, pensées diverses et en vrac, bavardages, parlottes, divagations et autres considérations. Dont acte. Cela faisait deux ans que j'attendais ça, mais un tour du monde, un peu de procrastination et une ombre, oh, juste une pincée de mauvaise volonté aidant, nous y voici...

Donc, merci ! Je ne serais sans doute jamais arrivée, sans eux deux, à me sortir de l'ornière "overblog" : payer pour ne pas avoir à subir de la pub, et payer pour un service moindre que lorsque c'était gratuit ! Avis à la population : fuyez overblog, à toutes jambes, à tous claviers azertys...

 

Bien, le temps de prendre la main sur cet espace et je reviens. Je connais déjà le sujet de mon premier "vrai" billet ici : poésie et cinéma !

 

Ah, et puis, tout de suite, message aux trolls : j'ai désormais la possibilité de choisir mes lecteurs et les éventuels intervenants de cet espace... A bon entendeur, salut, et bonjour aux autres...

 

Clopine revenue.

 

 

 

Combien de « T », dans Télérama ? Un, deux, trois ???

La journée d’hier, bousculée, tirée à heu et à dia entre plusieurs contraintes contradictoires, ne me laissait guère espérer être devant mon poste, à 22 h 05 pétantes. Pourtant, j’y étais, étonnée certes d’être là, avec un petit arrière-plan de remords (j’aurais d^u être ailleurs, certainement) mais bien décidée à en profiter !

Faisant partie de la grande tribu des « gouldeusiennes », j’avais tout pour être une téléspectatrice comblée. Une signature, Monsaingeon, évoquant un travail ému et rigoureux (je me souviens d’un Pablo Casals plus que pertinent).   Des archives inconnues, des citations provocatrices tirées du Journal de Glenn Gould (ah ! Les poils blancs de sa chienne sur son premier pantalon de concert !), et quelques rediffusions de Bach où le génie des deux hommes, l’auteur et l’interprète, vous empoigne comme un vent d’octobre, violent et suave à la fois…

Tout pour être heureuse…

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Ti'Punch, chien à câlins - 8/6/07

Bon. Il faut se rendre à l’évidence : nous n’aurons jamais de chien de ferme, comme on l’entend par ici, c’est-à-dire soit la pauvre créature hargneuse, s’étranglant à aboyer au bout d’une chaîne dès que quelqu’un pénètre dans la cour, soit, en version plus aimable mais faut pas s’y fier de trop près, en version « près de son maître », chien ne quittant pas d’une semelle le patron et n’accordant qu’une vague indifférence  au reste du monde.

Quant à avoir un chien à  moutons, il faut y renoncer aussi. Julot, notre aristocratique border-colley, avait beau descendre directement des premiers prédateurs, les loups donc, il ne faisait que fixer ses yeux jaunes sur les moutons, plein d’appréhension, et semblait à jamais incapable de les affronter. Ti’Punch, notre nouveau chien, un croisé border-labrador, développe certes un peu plus d’agressivité (grâce à moi, qui ai voulu l’habituer tout petit pour éviter l’échec julotien) . Mais à y regarder de plus près, il s’agit surtout, pour lui, de courir à fond de train, de tourner autour du troupeau en battant de la queue, de croire que si les moutons se mettent eux aussi à courir c’est juste pour jouer avec lui, de provoquer la brebis en charge du maintien de l’ordre et de revenir, quand cela lui chante, avec la langue rose et pendante de deux bons tiers, l’air étonné : « Comment ça vous m’appelez depuis un quart d’heure ? Comment ça je ne dois pas faire courir les bêtes ? Mais je n’ai rien compris, moi.. De toute manière je ne peux pas penser à tout et être partout, parce que je n’ai que quatre pattes.. »

 

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"Des racines et des haies" en DVD !

Pour commander le DVD du documentaire "Des racines et des haies" réalisé par Beaubec Productions

                                                                             

Julot, le pré et les moutons - 5/3/06

II faut bien reconnaître qu'avec les meilleures intentions du monde, Saint-Exupery a beaucoup nui à la cause ovine : quelle idée, cette histoire de mouflet réclamant qu'on lui dessine UN mouton. UN mouton ! Quelle aberration! Même simplement dessiné sur le carnet d'un aviateur, c'est horriblement malheureux, un mouton tout seul ! (presqu'autant qu'un petit prince sans sa rose...)    N'importe quel berger vous le dira : une vraie vie de mouton, c'est, d'un, de I'herbe, de deux, dès qu'on lève la tête hors des touffes, la vision de l'autre, du semblable à soi, du tout pareil, en train de faire exactement la même chose que vous, au même moment. II n'y a que cela qui rassure vraiment. Hors du troupeau, point de salut. A la moindre alerte, il faut vite se serrer les uns contre les autres, le nez dans la laine et la bonne odeur de son voisin. S'il faut courir, courir ensemble, tous ensemble, quitte à sauter les uns par-dessus les autres comme des athlètes olympiques, au 110 mètres haies !

Donc, DES moutons. Voila qui est dans I'ordre des choses. Des moutons, un pré, et un chien, bien sûr.

A Beaubec, il s'appelle Julot.    

C'est un chien de berger, ce qui signifie déborder d'enthousiasme dès que la barrière du pré s'ouvre, s'élancer en prenant tout juste le temps, au bout de dix pas, de jeter un rapide coup d'oeil en arrière pour bien vérifier les intentions du maître (« C'est bien cela ? Je ne me suis pas trompé ? On va bien aux moutons ? » ), redresser fièrement son panache noir, dont le bout blanc viendra caresser son échine au terme d'un arc de cercle presque parfait, et débouler à toute berzingue, en traversant le pré à I'oblique. C'est un vrai bonheur : le vent aplatit les poils autour du museau, les muscles, les pattes, tout obéit à la perfection dans une course parfaite, et les moutons, comme un seul homme (évidemment), se rassemblent en une masse compacte, tremblante, prête à obéir...    

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